Depuis la pandémie, de plus en plus d’établissements de santé font le choix d’internaliser l’impression 3D, notamment pour faciliter la préparation d’une intervention chirurgicale ou répondre à des besoins non couverts par des industriels. Mais, pas seulement…

La chirurgie comme la médecine interventionnelle, soit tout acte médical invasif pour effectuer un diagnostic ou un traitement sous guidage et contrôle d’un moyen d’imagerie, sont porteuses de risques. Le professeur David Fuks, chef du service de chirurgie digestive, hépatobiliaire et endocrinienne à l’Hôpital Cochin à Paris, l’a rappelé durant le Paris Campus Live sur l’innovation dans les pratiques au bloc opératoire, organisé le 13 juin dernier. La probabilité de complications sévères engageant le pronostic d’un patient serait quatre fois plus importantes que pour les deux activités précitées. L’impression 3D d’organes des patients à partir d’imagerie médicale (scanner ou échographie) permet aux chirurgiens de mieux préparer leurs interventions, et donc d’anticiper d’éventuelles difficultés et de rendre l’intervention la plus précise possible. C’est l’usage qu’en fait par exemple le service d’urologie du CHU de Bordeaux. Le professeur Jean-Christophe Bernhard, urologue spécialiste du cancer du rein au Centre hospitalier de Bordeaux, utilise depuis 2015 des reins transparents imprimés en 3D. Cette technologie "rend palpable ce qui ne l’est pas, à savoir l’imagerie", explique-t-il. Les pièces imprimées optimisent le repérage des branches artérielles veineuses qui vascularisent la zone autour d’une tumeur. Elles contribuent aussi à une meilleure compréhension de ce que va faire le chirurgien.

Cette technologie "rend palpable ce qui ne l’est pas, à savoir l’imagerie"

Un réseau qui fait bonne impression

Parfois, les médecins ont des besoins qui ne sont pas couverts par l’industrie. C’est le cas en pédiatrie. Le professeur David Fuks a exposé cette réalité : "Quand on a besoin d’une prothèse de hanche, nous disposons d’un catalogue avec un certain nombre de matériaux, mais il n’en existe pas pour les enfants". L’impression in situ de pièces sur mesure peut y pourvoir. Reste que cette activité nouvelle pour les hôpitaux doit être parfaitement cadrée et organisée. C’est dans cette optique qu’a vu le jour un réseau inter-CHU de plateformes d’impression additive. Delphine Prieur, responsable de celle de l’AP-HP, en a détaillé les objectifs lors de l’édition 2023 de SantExpo : "Mettre en commun nos compétences et savoir-faire, et disposer d’une veille partagée pour être la pointe de toutes les nouvelles technologies d’impression 3D. C’est aussi un espace pour rassembler les questionnements liés au réglementaire qui encadre la production de dispositifs médicaux." Le docteur Alice Prévost, chirurgien maxillo-facial au CHU de Toulouse tient à souligner à cette occasion que si "la structure réglementaire est un peu lourde à comprendre." Cette union devrait désormais donner plus de volume à l’internalisation de la pratique.

Pierre Derrouch

Mais aussi…

  • MB Therapeutics – start-up montpelliéraine née en 2022 et issue d’une collaboration entre Lynxter, fabricant bayonnais d’imprimantes 3D industrielles, et le CHU de Nîmes – propose une solution d’impression de médicaments personnalisés, basée sur une technologie de gel 3D. Autre intérêt, réduire le gaspillage d’ingrédients actifs en imprimant des médicaments à la demande.
  • Nous avons appris fin août que l’hôpital Necker-Enfants malades à Paris produisait désormais des modèles en 3D de tympans, pour aider les étudiants à maîtriser l’otoscopie. Cet examen du tympan et du conduit de l’oreille interne est délicat a réalisé, car l’angle d’accès au premier varie d’un patient à l’autre selon sa morphologie. Ces reproductions doivent faciliter la visualisation d’ensemble aux futurs médecins.