La présidente de la fédération socialiste de Paris espère que le parti à la rose suspendra son alliance avec LFI. Cela pourrait bien se décider lors du conseil national prévu mardi 17 octobre dans la soirée.
Décideurs. LFI fait preuve d’une certaine complaisance envers le Hamas. Beaucoup de socialistes demandent une rupture des relations avec les Insoumis mais aucun vote n’a encore eu lieu. Que se passe-t-il en interne ?
Lamia El Aaraje. Mardi dernier, les courants Refondations et Debout Les Socialistes qui correspondent à environ la moitié des militants et dirigeants du PS a demandé un vote pour acter la "suspension" de toute action collective avec LFI. Mais Olivier Faure n’a pas souhaité faire voter la résolution. Le scrutin aurait pu se tenir lors du conseil national de samedi qui n’a pas eu lieu en raison de l’assassinat de Dominique Bernard. Le conseil est prévu pour mardi 17 octobre au soir. Nous verrons bien si la résolution sera examinée et si la ligne du premier secrétaire sera mise en minorité.
Sur le papier, le vote s’annonce très serré. Pour l’emporter, il faudrait que des "pro Nupes" se rangent de votre côté…
C’est un scénario qui est possible. La Nupes est un accord électoral mais, aux yeux de nombreux militants et dirigeants, les valeurs priment sur le calcul. Des "fauristes" commencent à changer d’avis et estiment qu’une prise de distance avec les Insoumis est primordiale.
Vos opposants en interne soutiennent que la fin de l’alliance serait suicidaire sur le plan électoral. Qu’en pensez-vous ?
Je rappelle que le but de la gauche est de revenir au pouvoir. Une union avec un parti populiste comme LFI nous en éloigne chaque jour. Leur positionnement est trop outrancier pour rassembler au-delà d’un cercle de convertis.
De toute manière, le sujet n’est pas de penser à 2027 ou aux prochaines législatives. Il y a des moments où ce qui est en jeu va au-delà de la politique politicienne. La ligne tenue par LFI est si choquante que le prix du déshonneur est trop élevé.
Pour l’instant, les pro et anti Nupes forment deux courants au sein du PS. Craignez-vous une scission officielle ?
Impossible de répondre avec certitude. Je ne la souhaite pas mais on la touche du doigt. Je reçois de plus en plus de messages de militants qui veulent déchirer leur carte ou qui l’ont déjà fait.
"Je reçois de plus en plus de messages de militants qui veulent déchirer leur carte ou qui l'ont déjà fait"
Êtes-vous surprise par le positionnement de LFI qui renvoie dos à dos Israël et le Hamas que les mélenchonistes ne qualifient pas de mouvement terroriste ?
Non, pas spécialement. Durant les législatives, j’ai affronté l’Insoumise Danielle Simonnet qui a reçu le soutien sur place de Jeremy Corbyn, ancien leader de la gauche britannique dont les ambiguïtés avec l’antisémitisme sont avérées. J’étais en première ligne et je peux vous assurer que ça marque politiquement. On peut ajouter au catalogue les propos de Mélenchon sur Mohamed Merah, la "blague" de Mathilde Panot sur Élisabeth Borne "rescapée" ou encore Danièle Obono qui explique qu’elle n’est pas Charlie. Au bout d’un moment, ça suffit !
Il est de notoriété publique que LFI cherche à draguer un pseudo électorat musulman en essentialisant les individus, souvent contre leur volonté propre. Mais je ne pensais pas qu’ils iraient aussi loin. Le socialisme, c’est un humanisme. Jour après jour les Insoumis montrent qu’ils s’éloignent de cet idéal.
Leur prise de position concernant la situation internationale dépasse les bornes ?
Des atrocités barbares sont avérées : volonté délibérée de s’en prendre aux civils, viols, prises d’otages… La condamnation et la prise de distance sont nécessaires. Il est ignoble de réagir à chaud en mettant dos à dos le Hamas que l’on refuse de qualifier de terroriste et un État souverain. Condamner le Hamas et le qualifier de groupe terroriste n’empêche pas de demander au plus vite un accord de paix, une solution à deux États et une analyse de fond. Ce qu’a d’ailleurs fait le parti socialiste.
Propos recueillis par Lucas Jakubowicz