Largement élu président face à Kamala Harris, les troupes de Donald Trump ont mis en avant le triste sort subi par un écureuil domestique. Objectif : montrer leur amour pour les bêtes et fustiger des démocrates bureaucrates et sans cœur. Visiblement, cela a été efficace.
Pour remporter une élection aux États-Unis, il est nécessaire de caresser les amateurs d’animaux dans le sens du poil. Et en la matière, les républicains partent avec une belle longueur de retard. Les causes ? La fake news de Donald Trump sur les migrants haïtiens mangeurs de chiens et de chats, les propos de JD Vance qualifiant les électrices démocrates de "femmes à chat sans enfant" ou encore le fait que leur candidat se vante de ne pas avoir d’animal de compagnie. À cela s’ajoute le cas de Kristi Noem. La médiatique gouverneure du Dakota du sud a été privée de seconde place sur le ticket républicain. L’élue s’était vantée dans son autobiographie d’avoir abattu l’un de ses chiens trop difficiles à dresser.
Dans le sprint final de la campagne, l’état-major trumpiste a voulu envoyer un signe aux amis des bêtes, tout en restant fidèle à sa ligne politique. Pour cela, il a misé sur un écureuil. Impossible de mesurer l'efficacité de la technique, la victoire du républicain ayant été large. Mais une chose est certaine, cette mise en avant n'a pas porté tort au candidat.
Un petit écureuil si mignon…
Tout commence en 2017, le jeune Mark Longo, résident de l’État de New York sauve un bébé écureuil, orphelin de sa mère, renversée par une automobile. Pendant des mois, il fait office de parent de substitution, lui donne le biberon, lui sauve la vie. Adopter un écureuil est interdit dans l’État. Respectueux des lois, il le relâche au bout de quelques mois. Mais l’animal baptisé Peanut s’est attaché à Mark, à sa maison, à son jardin. Il revient, se montre aimant et attachant. De quoi faire fondre le cœur de son sauveur et de sa conjointe.
Adopté, il ne tarde pas à devenir une star d’Instagram où son compte recense plus de 500 000 abonnés. Hélas, Peanut est susceptible d’accueillir le bacille de la rage. Le 1er novembre, les autorités sanitaires sonnent à la porte de Mark Longo, se saisissent de l’écureuil pour l’euthanasier. Dans la foulée, le trentenaire a annoncé des sanglots dans la voix et les yeux pleins de larmes, la mort de celui qui "nous a apporté tant de joie, à nous et au monde". Inconsolable, il a ensuite écrit dans un autre post : "Je suis en état de choc, incrédule et dégoûté par les personnes qui ont fait cela à Peanut (…) La police est venue chez moi et a perquisitionné ma maison sans mandat de perquisition pour trouver un écureuil ! (…) J’ai été traité comme si j’étais un trafiquant et qu’ils cherchaient de la drogue et des armes".
Euthanasié par les bureaucrates démocrates !
Les républicains n’ont pas tardé à flairer la bonne affaire politique. Leur credo est le suivant : un État démocrate géré par les républicains est bureaucrate, intrusif, n’a aucun respect pour la liberté individuelle et préfère mobiliser ses ressources pour persécuter un écureuil plutôt que pour lutter contre la criminalité et l’immigration.
Evidemment, sur son réseau social X, Elon Musk n’a pas tardé à faire circuler ses éléments de langage. L’homme le plus riche du monde, qui ne fait pas mystère de son trumpisme, a réagi : "Le gouvernement ne devrait pas avoir le droit de débarquer dans votre maison et de tuer votre animal, c’est dégueulasse. Même s’il est illégal d’avoir un écureuil comme animal de compagnie (ce qui ne devrait pas être le cas), pourquoi avoir tué Peanut au lieu de l’avoir simplement libéré dans une forêt ?"
Donald junior Trump, fils de, a lui aussi tenté de donner de l’écho à l’affaire en critiquant vertement les démocrates : "Il est temps de se débarrasser d’un gouvernement tuant un écureuil mais qui autorise volontiers 600 000 criminels dont 13 000 meurtriers et 16 000 violeurs à entrer dans notre pays". Qu’importe que les chiffres soient non sourcés et que la mort du lagomorphe ait été décidée par un gouvernement régional…
Point important, mais la très institutionnelle commission judiciaire républicaine de la Chambre des représentants a dans une communication officielle demandé "justice pour Peanut". À voir si l’affaire est rentable électoralement dans un scrutin plus serré que jamais.
Lucas Jakubowicz